Quatre ans après l’accord de principe entre les locataires et le bailleur, à Toulouse, la plupart des 160 logements sociaux choisis pour l’opération ont été équipés de capteurs en novembre 2014. Ils sont représentatifs des 1 250 logements d’un programme de rénovation lourd, « clos et couvert », sur huit résidences. Alors que ce programme est presque achevé, la première campagne de collecte de données pouvait commencer avec l’arrivée de la saison froide. Premiers résultats attendus pour juin 2015.
Pour connaître la performance énergétique après travaux, Habitat Toulouse a fait appel au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Cet institut de recherche public couvre l’ensemble des problématiques liées au bâtiment. « Comme tous les instituts Carnot, nous avons des offres R&D ciblées. Mais nous sommes également capables de prendre en charge des développements avec des livrables opérationnels », explique Lionel Bertrand, chef de la division Innovation Développement à la direction Energie Environnement du CSTB.
Ce sont les travaux de son équipe, réalisés pour le compte de la start-up bretonne Actility, qui sont utilisés : ils ont consisté à développer « smart EPC », le module algorithmique qui sert de moteur d’analyse des données envoyées par les capteurs, et qui restituera le gain de performance intrinsèque ainsi que la signature thermique des logements. C’est aussi le CSTB qui assure le pilotage du projet pour l’installation des quelque mille capteurs et cinq antennes nécessaires. « Pour un T3, 4 ou 5 capteurs sont nécessaires », illustre Lionel Bertrand. Chaque pièce principale héberge un triple capteur température-humidité-luminosité, auxquels s’ajoutent des capteurs d’impulsion placés sur le compteur central d’électricité, voire sur celui de gaz pour les logements équipés.
Avec quelque 40 salariés, Actility est à la croisée du « machine to machine » (M2M) – c’est-à-dire la connexion et l’échange de données entre objets – et de l’énergie. Son fondateur, Olivier Hersent, est un « serial entrepreneur » issu des labos d’Orange.
« Nous sommes sur un cas extrême de réseau bas débit, avec une problématique qui est de collecter des données pendant trois ans avec certaines mesures toutes les dix secondes », explique-t-il. Les capteurs, fournis par une entreprise bretonne, NKE Electronics, fonctionnent sans piles et sans alimentation électrique, par « energy harvesting », en collectant l’énergie lumineuse diffuse. Quant au transport des données, il utilise des techniques de compression différentielle et le réseau à bas débit et longue distance ThingPark Wireless, qui repose sur la technologie d’origine française LoRa et la bande de fréquences libre ISM (Industriel Scientifique et Médical).
Ce type de réseau n’est pas le seul à se voir comme l’avenir du M2M pour des applications professionnelles. Mais LoRa aurait de sérieux avantages sur ses concurrents, selon Olivier Hersent : outre une portée de 15 km (3 km en ville), il se distingue par un débit variable qui lui permet de monter de quelques centaines de bits/sec à 50 kbits/sec quand le capteur est proche de l’antenne. Avec des transmissions plus courtes, c’est la durée de vie et la consommation d’énergie moyenne qui seraient optimisées, affirme Olivier Hersent. A Toulouse, cinq antennes auront donc suffi pour couvrir les huit résidences. Alors que le budget est de 5 000 euros par logement, soit une enveloppe de 800 000 euros, les trois partenaires voient déjà plus loin. Actility défend l’idée d’un réseau LoRa national à moindre coût, en support au M2M. « Nous avons plein d’idées de nouveaux services », glisse de son côté Lionel Bertrand, du CSTB. Détections incendie, répartition des frais de chauffage suivant l’usage, applications domotiques…, les pistes vont bien au-delà de l’efficacité énergétique.
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